Des algorithme éthiques: il y a urgence. Crédit image: Unsplash

Face à l’augmentation des fake news et de la désinformation, les réseaux sociaux se manifestent pour créer des algorithmes éthiquement plus responsables. L’an passé, Twitter a annonçait travailler sur une intelligence artificielle éthique pour améliorer ses algorithmes pour les rendre plus transparents, mais également pour donner un peu plus de contrôle aux utilisateurs sur les contenus qu’ils voient dans leur fil d’actualité. Ah oui, mais c’est pour quand?

Le premier but recherché par ces plateformes n’est pas de bien vous informer mais de vous garder le plus longtemps connecté pour vous confronter au maximum de publicité.

Aujourd’hui, c’est une évidence, les médias sociaux numériques sont des vecteurs de radicalisation politique. Le phénomène est avant tout dû aux algorithmes de ces réseaux sociaux qui hiérarchisent la visibilité des contenus. Ils favorisent les publications les plus marquantes et radicales car elles maintiennent l’internaute en ligne. Parce qu’il faut pas se leurrer: le premier but recherché par ces plateformes n’est pas de bien nous informer mais de nous garder le plus longtemps connecté pour nous confronter au maximum de publicité.

Guillaume Chaslot, un ancien ingénieur français, qui a travaillé pour Google avant de fonder AlgoTransparency a effectué des travaux sur le sujet et mis en évidence que YouTube amplifie systématiquement, via son système de recommandation, l’exposition des vidéos clivantes, sensationnalistes et notamment conspirationnistes. De même, l’algorithme de Facebook donne la priorité aux contenus qui suscitent de l’engagement. Si l’on veut qu’un message ait un impact, il faut qu’il fasse réagir. Plus les membres aiment, commentent, partagent une publication, plus sa portée organique est importante et donc moins il faut payer pour rendre le contenu visible. Or, un moyen facile de faire réagir est de provoquer ou de choquer.

De manière générale, il y a une prime à la virulence, à la surenchère, à l’exagération voire à la tromperie.

Guillaume Chaslot, fondateur de AlgroTransparency


L’arrivée massive des « fake news » est directement liée à cela. Une étude récente du MIT a montré que sur Twitter, les fausses informations se propagent mieux que les vraies, en particulier quand il s’agit de contenus politiques. Les vraies informations sont moins relayées alors que les contenus aberrants deviennent viraux car ils sont surprenants et divertissants.

Vous avez compris: un community manager qui souhaite que sa publication touche un grand nombre de personnes, doit « donner à manger » à l’algorithme en lui donnant du contenu virulent. Autre option: il paye.

Donc, la volonté de créer des algorithmes éthiques et plus justes est une bonne nouvelle. Mais c’est bien joli! Avec la surabondance des publicités, nos fils d’actualité sont envahis et c’est tout sauf éthique! Il devient de plus en plus compliqué de « tomber » sur des posts authentiques. A ce rythme, les internautes vont se lasser. Et provoquer le contraire du but recherché par les plateformes, à savoir les garder le plus longtemps possible.

Meta a tellement désavantagé l’engagement et la portée organiques des pages Facebook, que même les médias, garant d’un certaine qualité de l’information, se voient obligés de sponsoriser leurs publications. Alors d’un côté, on parle d’algorithmes authentiques, et de l’autre, il suffit de payer pour rendre n’importe quel contenu plus visible que les autres. Et paradoxalement, l’internaute se méfie des posts sponsorisés. Alors comment permettre la diffusion de contenu à caractère informatif et authentique?

En tant que professionnelle de la communication digitale, je veux continuer de croire que seuls les contenus authentiques ont de l’avenir. Je pense qu’il va falloir mettre le holà à cette surenchère publicitaire, car les milliards de gens qui passent aujourd’hui des heures sur ces plateformes méritent d’être confrontés dans une proportion raisonnable à de l’information véritable, éthique et juste. Et non pas devoir se frayer un passage dans la jungle des contenus payants et les mensonges. Les plateformes sociales ont également aujourd’hui une responsabilité sociétale et environnementale vis-à-vis de la crise climatique. Il est urgent que des algorithmes éthiques servant la cause environnementale ainsi que les immenses défis sociétaux qui les accompagnent soient développés.